INOUBLIABLE ARGENTINE

Je crois qu’il me serait impossible de quitter l’Argentine sans transmettre nos ressentis sur ce pays. Parfois, certains lecteurs ont pû s’offusquer de mes réflexions sur le coût de la vie argentine, pensant que ce n’était que  le résultat d’une radinerie ou d’une râlerie franchouillarde.

Pas du tout : c’est un constat de plus en plus confirmé, l’Argentine et surtout les Argentins sont pénalisés par les choix de leur classe politique et l’incidence de leur économie à la dérive ces dernières années. La ligne de conduite présidentielle est la fermeture progressive des frontières : les importations sont freinées (on ne compte plus les entrepreneurs qui nous disent prévoir une réception de marchandises provenant de l’étranger, à date de la commande, dans 1 mois, 3 mois ou jamais…) et que dire des relations commerciales maritimes avec des compagnies britaniques, qui sont purement et simplement suspendues (ils vont encore se chipoter combien de temps pour les îles Malouines ?) les touristes étrangers voient le prix des prestations s’envoler- à se demander s’ils sont toujours souhaités ici- . Les argentins, ont vécu, comme nous européens au moment du passage à l’euro, une augmentation démentielle des prix de produits de consommation de base . Certains argentins nous ont confié que les fins de mois étaient de plus en plus dures, même avec deux emplois dans le couple. Il est bien beau le discours électoral visant à vouloir fermer les frontières pour protéger et production et commerce nationaux … ici nous constatons l’effet pervers : les familles moyennes souffrent de l’augmentation des prix de l’alimentation et des combustibles, les loyers deviennent inabordables avec une faille qui se creuse entre les plus riches et les plus pauvres. En voyant les argentins se ruer  à la frontière pour profiter des zones franches au Chili, alors qu’à deux pas de chez eux, des industriels argentins produisent le même article, mais à un tarif inabordable, on se dit que la solution n’est pas là…

Lucas nous parlait justement de son impossibilité à acheter un logement : lui qui a pourtant un bon salaire, ne peut que louer (déjà à un prix exhorbitant). Les prêts à l’achat immobilier ne sont qu’à taux variables, impensable compte-tenu de l’instabilité économique de l’Argentine.

Même une devise peut devenir une denrée rare, le dollar en est la preuve ici : il est “impossible” d’en trouver. Nous savions que nous pouvions échanger des devises américaines à prix fort sur un marché parallèle. Plus besoin d’aller aussi loin, des expatriés ou des argentins voulant voyager n’ont plus que cette possibilité pour s’en procurer et le proposent ouvertement. De plus des achats conséquents peuvent être réglés en dollars avec une remise très avantageuse. Même pour la devise nationale, il y a parfois une queue d’une demi-heure aux distributeurs. Le tourisme des argentins à l’étranger n’est plus à la portée que des plus riches, même les achats ou opérations de carte bancaire à l’étranger sont taxées ! Lors de notre séjour, une rumeur enflait, provenant d’une loi visant à annuler tous les passeports en cours de validité : les argentins souhaitant quitter le sol national devront refaire une demande, et quelles vont être les nouvelles conditions d’admission ? Pour nous, ce frein à la liberté est inacceptable, mais finalement, seulement une minorité des habitants se mobilisent. Nous commençons juste à déchiffrer ce pays mais nous sentons une souffrance des argentins qu’ils camouflent sous le masque d’un franc sourire avec un “oui mais pourquoi aller ailleurs, il y a tout ici en Argentine !” ou bien sous le sceau de la fatalité “c’est comme ça !”

Bien que ce soit très personnel à notre famille (je rappele l’attaque de Bétina par trois chiens au Mexique qui comme conséquence a eu de terroriser nos TROIS enfants sur la gente canine) le fait que les chiens errants soient légion en Argentine, nous a un peu gâché le séjour. Les enfants ont toujours refusé d’aller seuls dans des parcs ou plages de peur de voir débarquer, deux, trois, voire plus de chiens qui leur tournaient autour sans cesse. On pourrait penser que les animaux, qu’ils aient un maître ou non, soient bien traités ce qui est faux malheureusement. Nous avons constaté que le chien est un peu le second jouet d’un enfant après une petite voiture ou une poupée. On peut acheter des chiots dans la rue, on les offre sans réellement se rendre compte de la portée du geste, ils sont traités comme des jouets (et donc pas forcément respectés par les plus petits) et que dire une fois que l’enfant en a assez (comme de tout jouet). Dans le meilleur des cas il reste à la maison un peu laissé à l’écart, dans le pire il est simplement abandonné ce qui ne fait que grossir les rangs de ces chiens de rues, qui pour vivre, éventrent les poubelles.

Enfin, si nous n’avions aucune connaissance sur les îles Malouines, après 6 mois de “matraquage” en Argentine nous savons, qu’ils sont toujours en conflit avec les britaniques (voir des panneaux immenses sur un port national, traiter les anglais de pirates, sans que cela ne choque personne est assez édifiant et éloquent sur la force de résistance des argentins). OUI les Malouines se trouvent au large des côtes argentines, OUI les britaniques s’y sont installés avant eux, et OUI les argentins veulent reprendre possession de ces îles qui pour eux leur appartiennent et NON les britaniques ne veulent pas céder. Bref… sur tout le territoire argentin, des panneaux rappelent à qui voudrait l’oublier que les Malouines, étaient, sont et resteront Argentines. Sans compter les entraînements militaires auxquels nous avons assisté à Rio Grande, qui font que les forces militaires sont sur le “qui-vive” et prêtes à repartir se battre contre l’Angleterre, comme en 1991. Quand on voit à quel point les chiliens et les argentins se sont toujours bataillé pour s’installer sur des terres reculées et hostiles, afin d’être premiers à les occuper (et exterminer les locaux accessoirement) je me dis que le côté “conquistador” a encore de beaux jours devant lui.

Alors nous qui aimons ces argentins, qui sont l’essence même de l’adjectif “accueillant”, buveurs de maté invétérés, souriants et optimistes, champions de l’asado et du dulce de leche, qui manient l’humour avec dextérité et 31ème degré, fêtards et parfois bruyants.

Mais qui ont aussi des horaires à géométrie variable et sont exaspérants quand il s’agit d’écologie et de respect du lieu sur lequel ils pique-niquent.

A eux tous, nous leur souhaitons réellement de trouver un équilibre. Et comme cela déborde largement de l’Argentine, on l’espère aussi pour la France, qui , bien que nous le voyions de loin, se débat avec les mêmes préoccupations…

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